Les nuits….On pourrait penser dans l’ensemble qu’elles se ressemblent toutes, qu’importe le lieu, qu’importe l’endroit, c’est toujours ce même firmament bleu sombre s’étendant à l’infini, ces mêmes étoiles, phares perpétuels guidant le naufragé, nous contemplant de la voute céleste, ce même silence couvrant de son lourd manteau les terres environnantes,…
Et pourtant, chaque lieu, de part son histoire, de part son atmosphère, de part les peuples qui y habitent, habille les nuits, les transforme, les rend unique, voir intemporel.
Une nuit à Altdorf peut, par exemple, emporter son lot de badauds dans les méandres des rues sinueuses de la cité impériale, les débauchant pour plusieurs heures. La place du marché se déserte alors au profit des maisons de passes remplaçant la criée des négociants par les soupirs étouffés des filles de joie dans l’oreiller.
Une nuit dans la taverne des 2 rivières, situé sur la route de Kiel, amène les pèlerins jusqu’à son antre, ces arpenteurs des routes se retrouvant, à peine le pas de la porte franchie, happés par la douce chaleur d’un feu de cheminée, les rires gras des habitués, le bruit des choppes s’entrechoquant et les effluves de sanglier accompagnant leur solitude pour une soirée éphémère mais O combien salvatrice.
Une nuit à Rauskel, petit village de pêcheurs à quelques kilomètres à l’est de Neues Emskrank, se passe tranquillement, calmement au fil des clapotis des barques sur la rive. Une nuit privilégiée où enfants et parents, maris et femmes, se réunissent autour d’un modeste diner, les assiettes presque vides contrastant avec le foyer empli d’amour.
Et puis il y a cette nuit au Haut col…
Au coucher du soleil, déjà, l’horizon se teinta de pourpre, prémisse d’une nuit sanglante, d’une nuit violente, d’une nuit longue et interminable.
Cette nuit…Qui résonna des sabots ferrés des chevaux percutant le sol rocailleux, rythmant la charge des Ceyl Arhain Cynath, charge menée par le Commandeur lui-même, lançant leurs montures, lui et ses hommes, à bride abattue dans la bataille, percutant de plein fouet le flanc exposé de l’armée adverse, faisant jouer dans leurs mains expertes, leurs épées étincelantes, ultime révérence à l’astre lunaire avant que les lames miroitantes ne deviennent écarlates.
Cette nuit…Qui vit L’Ordre du Saint Marteau déferler sur l’Ost du Nord, se déversant sur l’ennemi telle l’eau purificatrice, dévastant les terres impures, déracinant les arbres souillés, nettoyant chaque parcelle de terre par un déluge de versets sigmarites et de coup de marteaux cerclés de fer.
Cette nuit toujours…Nuit durant laquelle la Confrérie des Mercenaires du Reikland traça son empreinte dans les rangs nordiques, sillon de sang et de feu sur les corps impies, semant la graine de la mort, tranchant, coupant, frappant avec comme détermination le miroitement d’une solde juteusement gagné.
Cette nuit enfin…Heure idéale où les loups d’Ostland sont de sortie, galvanisés par l’odeur métallique du sang et celle plus acre de la peur, ces loups assaillant les chaotiques, tournant autour de leur proie, les prenant sur les flans puis faisant front, bondissant en arrière pour mieux les chopper au cou, la carotide en ligne de mire. Dans cette danse synchronisée où chacun devient l’autre, où la meute ne fait qu’un, le jeu de jambes final est fatal pour l’ennemi.
Cette nuit…où l’on pourrait presque entendre, alors que les troupes adverses trépassent sous les coups conjugués d’une alliance fortuite, hurler à la lune un loup au pelage roux comme pour sommer aux Dieux de mirer la puissance de l’unité face à la marée incessante des serviteurs des ténèbres.
On pourrait croire qu’avec la conquête du fort, qu’avec la déroute des troupes nordiques en faction, le calme reprendrait ses droits, que le vent emporterait l’odeur de la poudre au loin et que les terres termineraient de se repaitre du sang versé. Mais le fort n’était qu’un passage obligé, une étape, un acte transitoire vers un final plus sombre, une somnolence éphémère menant à un sommeil plus profond, sommeil trouvant légitimement place dans le berceau de la nuit.
Et c’est bien elle qui fut de nouveau le témoin de leur marche, elle qui, de part sa clarté, permit aux troupes du Commandeur Ilaënys Lùinwë de trouver les empreintes laissées sur la croute neigeuse, elle toujours qui les épia, juchée du haut de sa tour céleste, prendre en chasse les fuyards et dans le même temps l’otage recherché, elle, enfin, qui fut spectatrice de leur sombre découverte à la lisière d’une forêt de ce temple couleur ébène à l’aura corruptrice.
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Le sanctuaire s’élevait ainsi, haut dans le ciel, pied de nez à la face céleste, défiant la nuit de balancer son savoir sur les rituels et cérémonies qu’elle fut l’observatrice. La masure respirait le mal, les murs semblaient palpiter, tel un cœur déversant dans les veines de la terre et des hommes sa noire empreinte. De l’intérieur s’élevait des chants, complaintes et litanies occultes adressées aux Dieux sombres… Etrange qu’avec toutes ses louanges, aucun d’eux ne prévint ses disciples de l’entrée fracassante de leurs ennemis.
C’est donc dans l’étonnement général, stoppant leur léthargie mystique, que les cultistes accueillirent les 4 armées : Ordre du Saint Marteau, Confrérie des Mercenaires du Reikland, Ceyl Arhain Cynath et Compagnie des Loups d’Ostland frappèrent rapidement, profitant de l’effet de surprise pour gagner les premiers mètres de la Cathédrale impie sans une égratignure…Du moins de leur côtés car déjà plusieurs cadavres, pantins désarticulés dans les mains amusées de la faucheuse, gisaient au sol.
A l’unisson, les fanatiques ripostèrent et la nuit se remplie de nouveau des détonations, des crissements de lames sortant des fourreaux, orchestre mortuaire d’une symphonie martiale dans laquelle ténors et cantatrices sont légions, donnant de la voix à chaque coup d’estocs et de taille, cri d’agonie des assiégés emplissant le temple de l’acte final de leur vie.
Inlassablement, les cultistes tombaient, inlassablement, d’autres arrivaient, inlassablement…
Tandis que le plus gros des troupes maintenait le flot continuel de chaotiques en respect, un détachement continuait son avance jusqu’à une pierre macassar. Le monolithe, phallus d’ébène aux veines nacrées, irradiait le mal et la puissance, force et violence et malgré le caractère figé de cette matière minérale, plusieurs ondes de chocs cueillirent les fous osant le détruire. Comme en réponse au cri de détresse du mégalithe, le grand prêtre du temple, l’orateur privilégié de ce sanctuaire, celui qui se doit d’avoir la ferveur de ses disciples lévita jusqu’à l’assemblée, telle une feuille d’automne tombant de l’arbre affaibli, si ce n’est que faiblesse n’était qu’apparat qui jeta à la face des envahisseurs pour révéler sa force et sa fureur. Le combat fut d’une violence telle que même la lune se voila derrière un nuage, préférant se perdre dans les brumes que d’être témoin d’une telle brutalité, bestialité car d’homme le prêtre devint monstre, reptile gigantesque prêt à happer les guerriers dans les méandres de sa gueule titanesque.
Mais il succomba…
…
Il y a des nuits qui paraissent interminables, éternelles…Imaginez celle d’un homme ayant tout perdu, imaginez celle d’un homme n’ayant pour espoir que de voir s’arrêter sa douleur, que de voir la mort en face, mettant fin à d’abominables tortures, un homme ayant choisi de vivre reclus dans son esprit plutôt que d’assumer les souffrances perpétuées…
Imaginez maintenant qu’au bout du tunnel, comme une éclipse surprenant l’incrédule, une lueur apparaisse, imaginez que l’on vous extirpe de votre cauchemar, que l’on vous traine jusqu’à la sortie du temple, que le vent fouette votre visage et que vous posiez des yeux livides sur vos sauveurs, sur ces mercenaires nommés Loups d’Ostland et mercenaires du Reikland, sur ces hommes pieux du Saint Marteau ou sur ces fiers elfes de Ceyl Arhain Cynath, imaginez alors l’espoir sans doute retrouvé lorsque l’homme entendit alors :
« Vous êtes Sir Bausteim ? » Imaginez sa joie lorsque ce nom raviva en lui assez de force pour qu’il acquiesce…Il venait de regagner un brin d’humanité…
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Il y a des nuits où tout peut arriver…